Au Venezuela, on est pro ou anti-Chavez avant d’être lesbienne, gay, transsexuel ou bisexuel (LGTB). A la tête de l’association Venezuela Diverse, Yonatan Matheus s’en désole : « La polarisation politique a affaibli et démobilisé la communauté LGTB. »
Le Venezuela est l’un des rares pays d’Amérique latine où le mariage homosexuel ne fait pas débat. Ni le candidat du Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), Nicolas Maduro, ni le candidat de l’opposition, Henrique Capriles Radonski, n’évoquent le sujet. Dimanche 14 avril, ils se disputeront les voix de 17 millions d’électeurs pour désigner le successeur d’Hugo Chavez.
« La défense de la liberté d’expression et des droits fondamentaux, en bref de la démocratie, est devenue un tel impératif que la cause LGTB s’est trouvée reléguée au second plan », affirme Yolanda Delia, transsexuelle. Elle s’appellera bientôt Joaquin et déteste ce gouvernement, « qui a fait de la polarisation une stratégie fondée sur la haine ».
Le mariage ? « Une institution bourgeoise dont la première fonction est depermettre la transmission du patrimoine », résume Gabriel Silva, président du Bloc socialiste uni pour la libération homosexuelle. Moulé dans son tee-shirt rouge, Leandro Villoria explique : « La lutte des classes est le vrai problème. Quand tu es homo et pauvre, tu as besoin d’abord d’un emploi, ensuite d’un logement. Le mariage est le cadet de tes soucis. »
En compagnie de plusieurs camarades, Gabriel tient le stand rouge du PSUV, installé dans la rue Villaflor, haut lieu de la bringue gay de Caracas. Yonatan fait discrètement remarquer que le terme « gay », « à connotation impérialiste et consumériste », n’a pas cours ici. Le programme de M. Maduro parle de population »sexo-diverse ».
« Nous avons été la première organisation à prendre ouvertement parti et àsoutenir Hugo Chavez dès 1999 », explique Gabriel, qui définit en riant son mouvement comme celui des « pédés révolutionnaires ». Un adolescent s’approche du stand et demande s’il y a distribution de préservatifs. Pas ce soir. Il repart avec le programme du PSUV.
Ricardo Hung, lui aussi directeur d’une petite association, Alianza Lambda, brandit le programme de l’opposition, « histoire de montrer que le candidat de la droite ne fait pas une seule fois mention de la communauté LGTB ».
« La révolution a fait avancer la cause LGTB. Plusieurs lois, dont celle du travail, interdisent aujourd’hui la discrimination en raison de l’orientation sexuelle, rappelle la chaviste Dayana. Mais il reste encore beaucoup à faire pour changer les mentalités et les pratiques. » Les dérapages du candidat Maduro sont là pour lerappeler.
En 2012, alors qu’il était ministre des relations extérieures, M. Maduro avait traité M. Capriles de « mariconsote » (« gros pédé »). Il a dû s’en excuser auprès de la communauté LGTB. « M. Maduro a encore beaucoup à apprendre, admet Gabriel.Hugo Chavez n’aurait jamais dit ça. »
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