L’Amérique du Sud est un terreau fertile d’idées et un acteur de première catégorie dans la lutte des dominés. Chávez l’a bien compris et il est un digne représentant de l’hésitation propre aux Chrétiens qui s’attellent à la dure tâche de combattre la misère : faut-il chasser les marchands du Temple ou mourir sur la Croix ? Une question ambiguë traçant la ligne de conduite des Chrétiens, entre activisme et pacifisme, entre bourreaux des dominants et martyr pour la cause.

Tout à la fois, Chávez pratique ainsi coup d’état, propagande électorale, népotisme, provocation, mais aussi solidarité et générosité. Il marche sur des œufs en essayant d’avancer en libérateur. Noam Chomsky qualifie ainsi son action : « Parler de paix et critiquer ceux qui s’y opposent est relativement facile, il est plus difficile de créer un monde nouveau, un monde différent. » L’intellectuel américain met effectivement le doigt sur un des domaines importants de la théologie de la libération, la praxis. Car comme nous le rappellent ces théologiens, il ne s’agit pas de condamner des faits et de rester sur un constat ; l’abbé Pierre en France nous disait : « La misère ne se gère pas, elle se combat. »

On ne pourra pas dire de Chávez que c’était un tiède : il est engagé et remuant. Il n’hésite pas à se salir les mains dans les aléas du concret. Le personnage est ainsi à la fois réélu mais dirige une société divisée et violente. Il promeut des actions sociales bénéfiques aux populations pauvres mais se retrouve finalement dans la peau d’un petit père des peuples.Chávez est un politique contestable, quelques fois cynique avec ses alliés objectifs. Il est aussi un symbole de lutte pour plus de justice et pour un droit que les mondialistes semblent oublier : celui des peuples à disposer d’eux même. Il n’est donc certainement pas le Messie, mais plutôt un personnage proche d’Antonio de Montesinos reprenant Saint-Jean dans son sermon: « Je suis la voix qui crie à travers le désert. »

Source : Ce que Hugo Chávez doit à Jésus-Christ (ou l’inverse)