Hugo Chavez a-t-il été assassiné ? Nicolas Maduro, président par intérim du Venezuela, donné favori pour l’élection présidentielle d’avril prochain, a annoncé l’ouverture d’une enquête officielle. Le cancer qui a emporté le « Comandante » pourrait bien, a-t-il déclaré, être dû à l’action d’ « agents impérialistes » qui auraient subrepticement contaminé le président défunt par des cellules malignes. Même s’il affirme ne désigner pour l’instant aucun coupable, les Etats-Unis sont clairement visés. L’actuel (et peut-être futur) maître du Venezuela perpétue ainsi une pratique familière aux régimes totalitaires ou populistes, celle de la « rumeur d’Etat ». La rumeur politique ordinaire, utilisée dans le cadre national pour discréditer un rival, est par nature anonyme. La « rumeur d’Etat », au contraire, est relayée, encouragée, voire créée par le pouvoir comme arme de politique étrangère. Les régimes communistes la maniaient avec maestria pour entretenir dans leurs populations l’image d’un camp capitaliste ravagé par la misère et voué au déclin.
La rumeur d’Etat est indifférente à la vraisemblance (des cancérologues, au Venezuela même, ont dénoncé l’absurdité de l’hypothèse d’homicide) et peu regardante sur l’argumentaire (un des « indices » évoqués par Maduro est l’enquête récemment ouverte sur la mort d’Arafat). Elle vise surtout, en entretenant la crainte d’une menace extérieure, à consolider le sentiment national et l’attachement au pouvoir en place. Accessoirement, ce rôle de protecteur de la nation fait aussi partie de la tactique électorale de Nicolas Maduro. Une tactique qui peut sembler risquée, quand on sait que les Etats-Unis sont le premier débouché extérieur du pétrole vénézuélien, absorbant plus du tiers des exportations, et que la rente pétrolière, principale ressource de l’économie du pays, est en quelque sorte la prime d’assurance du pouvoir politique. Le Venezuela va-t-il fermer le robinet pétrolier aux Américains ? C’est fort peu probable, de l’avis des analystes. L’accusation lancée contre le puissant voisin du nord est plutôt une manoeuvre de défense, un message destiné à prévenir toute tentation d’ingérence auprès d’un peuple acquis à la « théorie du complot ». Pour le reste, pendant la crise politique, les affaires continuent.
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