Trop beau pour être vrai? Dans l’attente de l’élection de dimanche, les Vénézuéliens sont plongés dans une incertitude digne des meilleurs exercices démocratiques, une ambiance qu’ils n’avaient plus connue depuis des lustres. Le scrutin sera-t-il juste? Se pourrait-il que Nicolas Maduro, l’héritier d’un «chavisme» depuis longtemps réduit à une caricature en carton-pâte, en vienne à faire ses bagages s’il perd les élections, comme le prédisent désormais tous les sondages sérieux du pays?

Dans une campagne aux accents parfois messianiques, c’est Maria Corina Machado, opposante de la première heure, qui est chargée de donner la dernière chiquenaude. Mais le régime chaviste n’est pas en manque de subterfuges pour contrer cet assaut, lui qui a tenu si longtemps grâce notamment à ce genre de procédés, et qui est devenu au surplus de plus en plus clairement autoritaire.

Maria Machado elle-même, dont la radicalité de son opposition est précisément ce qui la rend aujourd’hui si populaire, a été déclarée «inéligible» pour de filandreux prétextes. Des centaines de militants de l’opposition ont été arrêtés ou menacés. De surcroît, les millions d’exilés n’auront pas le droit de voter, bien qu’ils représentent maintenant plus du quart de la population. Dans toutes ses ramifications, à tous les niveaux, l’Etat vénézuélien se confond avec le parti chaviste. A la reconnaissance d’une défaite, encore hypothétique, s’ajoute la difficulté d’envisager une transition sans heurts après un quart de siècle de mainmise absolue sur toutes les institutions.

Derrière les rideaux, on fait état de «contacts», voire de négociations, qui permettraient à Nicolas Maduro de monnayer le prix de son retrait. Le Venezuela, qui dispose des réserves de pétrole les plus importantes de la planète, est devenu un enjeu encore plus considérable, pour les Etats-Unis comme pour les Européens, depuis l’invasion russe de l’Ukraine. «Les gringos rêvent de revenir», persiflait le président pendant la campagne. A l’échelle de l’Amérique latine, pourtant, la prise de distance vis-à-vis de Maduro de deux présidents de gauche emblématiques, le Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et le Colombien Gustavo Petro, montre bien que l’essentiel est ailleurs. «Ceux qui gagnent restent, et ceux qui perdent partent», a résumé Lula. Le b.a.-ba de la démocratie.

Source : Le Venezuela, au seuil du grand saut? – Le Temps


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